mai 2005 - mai 2015 : l’Union européenne refuse le vote des peuples, et transfère le pouvoir aux multinationales par Attac Rhône

, par Robert Joumard

Le 29 mai 2005, comme les Hollandais trois jours plus tard, les Français ont refusé le projet de Traité constitutionnel européen, par 55 % des voix et avec un taux de participation exceptionnel de 69 %. Cette volonté du peuple (incontournable en démocratie) n’a pas empêché les députés et sénateurs d’adopter trois ans plus tard le Traité de Lisbonne, identique au projet de Traité constitutionnel. L’Union européenne telle qu’elle est organisée par le Traité de Lisbonne est donc illégitime, et par suite toutes ses décisions.

Le 25 janvier dernier, les électeurs grecs ont donné la majorité à un gouvernement défendant les droits sociaux des citoyens, contre la politique d’appauvrissement de l’immense majorité imposée par l’Union européenne, avec un taux de participation de 64 %. Mais, par le chantage à l’emprunt, l’Union cherche à imposer aux Grecs sa propre ligne politique favorable aux multinationales, en opposition au choix des citoyens.

Il est vrai que les 3 composantes de la troïka qui défend les intérêts des banques occidentales sont présidés par des personnalités remarquables : la Commission européenne par un ex-premier ministre luxembourgeois qui a organisé l’évasion fiscale de très nombreuses multinationales et qui a déclaré en janvier dernier : « il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens déjà ratifiés » ; la Banque centrale européenne par un ancien responsable de la banque Goldman Sachs qui a aidé les précédents gouvernements grecs à maquiller leurs compte et qui nie l’idéal social de l’UE en affirmant que « le modèle social européen est mort » ; et le FMI par une ancienne ministre des finances qui a aidé Bernard Tapie à recevoir indûment de l’État 400 millions d’euros en acceptant un arbitrage privé.

Il est donc impossible de ne pas ratifier un traité européen et ses politiques néolibérales, et un État membre ne peut décider d’autre politique que néolibérale : traités européens et politiques néolibérales sont donc obligatoires, ne peuvent faire l’objet d’un choix par les citoyens. Ne serions-nous pas dans une dictature des multinationales, des banques et de leurs serviteurs nationaux et européens ?

En parallèle, l’Union européenne s’est lancée dans la négociation de multiples traités dits de libre-échange, avec les États-Unis, avec le Canada, avec l’Afrique, et avec 23 autres pays pour privatiser les services publics. Ces traités sont en fait des traités de liberté des affaires et des profits, des traités d’allégeance aux multinationales. Déclin de l’agriculture de proximité, transition écologique impossible, rôle premier des multinationales dans la définition des normes et des lois, condamnation des États qui auront osé une réglementation du travail ou de l’environnement contraire aux intérêts de court terme des grandes entreprises : telles seront les conséquences de ces traités iniques selon d’innombrables associations citoyennes, syndicats de salariés, patrons de PME, élus locaux, et bien sûr citoyens.

L’Union européenne et la plupart de ses États membres ne sont plus que le terrain de jeu des multinationales et des forces politiques à leur service. Leur objectif n’est que l’enrichissement des plus riches et le renforcement de cette oligarchie, au détriment des peuples qui voient le peu de pouvoir qui leur reste s’effilocher et leurs conditions de vie se détériorer. Quitte à voir l’Union européenne exploser.

Alors que l’Union n’a jamais été aussi riche, ses citoyens seraient-ils condamnés à faire allégeance aux riches et aux puissants, à retourner au 19e siècle, voire avant la Révolution française ?

Comme en 2005, osons exprimer notre refus de laisser une infime minorité s’emparer du pouvoir et des richesses – que nous produisons – au nom de la concurrence libre et non faussée et du "libre-échange".